The Killing of Satan – Efren C. Piñon
The Killing of Satan. 1983Origine : Philippines
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Lando, ancien justicier condamné par la justice de son pays, cherche à se reconstruire une vie moins tumultueuse. Manque de chance, son passé le rattrape : il se prend une balle dans la tête. Heureusement ou malheureusement, Lando ne meurt pas et revient à la vie comme si de rien n’était. Contacté en rêve par son oncle, il se rend avec sa famille là où vit ce dernier, pour apprendre que le tonton n’est plus, mais que lui, le brave Lando, le moustachu le plus courageux du monde, doit s’acquitter des tâches de feu son parent, un sorcier. Ce n’est ni plus ni moins à Satan que Lando aura affaire lorsque sa fille sera kidnappée.
Voici une perle totalement méconnue de l’industrie du bis philippin (un pays bien rôdé en la matière, avec son expérience auprès des têtes de file que sont l’Italie ou les Etats-Unis). Un de ces films stupéfiants, alignant les non-sens et les énormes carences budgétaires sans complexe aucun. Le réalisateur Efren C. Piñon vise haut : son histoire évoque le thème biblique central à toute chose religieuse : la lutte entre le bien et le mal. Aucun bémol, c’est le bien absolu contre le mal absolu : c’est Satan opposé à Lando, qui en cours de route apprendra que sa mission ne fut pas seulement tracée par son oncle, mais que Dieu lui-même, vieillard barbu vêtu de blanc, est là pour le soutenir, intervenant au milieu de son périple pour lui confier l’arme ultime dans la lutte contre le diable : un bout de bois magique capable de produire des rayons lasers pourris. Et Lando en aura bien besoin, pour vaincre un Satan armé d’une fourche en carton, vêtu d’une combinaison moule-burnes (tantôt rouge tantôt noire, puisque Satan se transforme avant le final) et reconnaissable avant tout à sa tête sur laquelle deux petites cornes se font encore plus remarquer que la barbichette en pointe. Riant à gorge déployée, chantre de la corruption des hautes valeurs philosophiques expliquées en des mots d’une rare naïveté (les dialogues sont tout autant surréalistes que le reste du film), il est le chef de toute une galerie de démons ne craignant jamais le ridicule. Il y aura notamment un mort-vivant pourrissant sortant de l’eau ainsi que plusieurs animaux se transformant en humains, ou inversement. Le serpent, animal fétiche du diable, est omniprésent dans le film, et, outre qu’il est jeté au visage du héros dès que le besoin d’action se fait sentir, il sert aussi d’excuse à l’improbable arrivée d’un homme-serpent nu, huilé, à la langue fourchue et à la gestuelle excentrique jusqu’à l’extrême.
Tout, absolument tout est foutraque et va dans le sens opposé d’une intrigue se voulant biblique et pleine de bonne morale. A force de se montrer charitable envers les dames en danger, le héros finira même par passer aux yeux du spectateur pour un mysogine bien réactionnaire, aidé en cela par un réalisateur n’accordant aux femmes de son intrigue que des places de potiches (toute une nuée de prisonnières à poil tout juste bonnes à dire “merci” à leur libérateur, qui n’a pas que ça à foutre que de rester avec elles pour les aider à sortir de l’enfer), de pleureuses admiratives ou de salopes diaboliques usant de leurs charmes. Mais il serait inutile de faire une liste des ratés d’un film qui ne comporte même pas une seule scène crédible, pas même sa nudité ou son quota de gore (des tripes sèches et rigides, à l’exact opposés de la tripaille dégoulinante achetée chez le boucher généralement utilisée dans des films de cet accabit). Mentionnons tout de même en dernier exemple l’un des moments les plus saugrenus du film : un duel télépathique façon Scanners entre un vieux grimaçant à s’en décrocher la mâchoire et un gros louchant à s’en faire pêter les globes occulaires. Tout ceci est mis en scène avec un manque d’inspiration criant, avec une photographie inexistante et avec un montage venant parfois interrompre des scènes d’action avant même qu’elles ne soient terminées. The Killing of Satan est un sous-Bioman (pour le raffinement des effets spéciaux relatifs aux “méchants”) biblique conçu comme une kermesse d’école élémentaire. C’est un spectacle hors-normes, parfois difficile à suivre (il faut dire que les dialogues -en version originale anglaise- ou les péripéties ne sont pas très claires), mais faisant relativiser la médiocrité de certains films parfois hâtivement taxés de “nanars”. Devant sa vision, on ne peut que rester scotché à l’écran…