Puppet Master II – David Allen
Puppet Master II. 1990Origine : États-Unis
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Retour à l’hôtel de Bodega Bay où l’Office d’investigation américain sur les manifestations d’ordre paranormal dépêche une équipe pour enquêter sur les mystérieux événements survenus lors du premier film. Très vite, les choses se corsent lorsque l’un d’eux vient à disparaître sans laisser de traces et qu’un autre se fait assassiner dans son lit par une marionnette. Professionnels avant tout, il en faut plus pour émouvoir les rescapés, lesquels poursuivent leurs investigations. L’apparition soudaine d’Eric Chaney, un drôle de bonhomme au visage bandé qui dit vivre dans cet hôtel depuis longtemps, ne les gêne pas davantage. Et pourtant, cet homme poursuit un but précis qui ne doit épargner que la seule Carolyn Bramwell, en laquelle il voit la réincarnation de sa défunte bien-aimée Elsa.
Fort du succès en vidéoclub du premier Puppet Master, Charles Band se sent pousser des ailes et lance rapidement la production d’une séquelle. Fort logiquement, David Schmoeller n’est pas de l’aventure, et la paternité de l’histoire sera à nouveau attribuée à Charles Band, lequel a une idée très précise de la direction vers laquelle il souhaite orienter la série. En ce sens, il soumet au nouveau scénariste David Pabian quelques doléances, comme celle de se débarrasser de « Leach woman », marionnette qu’il détestait. Et dans le souci de donner davantage de place aux marionnettes, Charles Band confie la réalisation à Dave Allen, responsable des effets spéciaux du premier film, qui a donc ici double dose de travail. Cela se ressent dans le rendu des effets spéciaux, globalement bien moins convaincants que dans le premier film. Et de manière générale, si ce Puppet Master II contient plus d’action, il s’avère encore moins passionnant que son prédécesseur, pourtant déjà assez soporifique.
Voulu comme une suite directe – le devenir d’Alex Whitaker est évoqué, Megan est déclarée décédée – Puppet Master II ressemble davantage à un remake. Déjà, le scénariste se permet de réécrire l’histoire d’André Toulon à sa sauce, lequel n’est plus mort assassiné en 1939 mais en 1941. De même, celui qu’on présentait comme français dans le premier film parle ici avec un accent germanique prononcé. D’ailleurs, l’intrigue s’attache à typer davantage le marionnettiste, lequel s’inscrit ici dans la droite lignée des personnages tragiques de la littérature fantastique. En homme transi d’amour qui ne rêve que de retrouver sa bien-aimée, André Toulon convoque l’image du comte Dracula. Et visuellement, il renvoie à l’homme invisible popularisé par James Whale dans le film éponyme de 1933. Peu avare en références (on croise même un gamin tête-à-claques qui se prend pour Indiana Jones !), Puppet Master II tente de jouer dans la cour des grands classiques mais sans une once d’idée neuve. Le seul apport notable se limite à la création de Torch, une nouvelle marionnette aux airs de soldat nazi dont le bras droit est remplacé par un lance-flammes. Une idée qui paraît pour le moins saugrenue de la part d’un homme qui fuyait ces mêmes nazis dans le premier film. L’André Toulon de ce second volet n’a en définitive plus grand chose à voir avec celui esquissé par David Schmoeller. Ce lien paternaliste qu’il entretenait avec ses marionnettes a totalement disparu. Il ne cherche plus à les préserver mais à les utiliser pour ses desseins personnels. A ce titre, il agit davantage comme Neil Gallagher, poussant le mimétisme jusqu’à mourir de la même manière que lui. Un bel éloge de l’originalité qui conforte cette entêtante sensation d’assister à un pauvre remake.
Cette pauvreté se retrouve dans le traitement des autres personnages, dont la présence ne se justifie que par le besoin d’aligner les cadavres. Ainsi, la mort de Patrick, frère de Carolyn, ne provoquera pas un grand émoi. Une fois son corps remisé dans une chambre froide de l’hôtel, ses compagnons poursuivront leur travail comme si de rien n’était. Rien ne semble pouvoir les perturber, pas même la présence de ce vieil original à la démarche hésitante qui erre dans les couloirs. Pour autant, leurs activités n’occupent pas une grande place dans le récit. Passée leur introduction, Dave Allen se désintéresse totalement de leurs recherches, et n’exploite même pas les nombreuses caméras qu’ils ont installées un peu partout dans l’hôtel. Il y avait pourtant matière à orchestrer quelques scènes de trouille bien sentie, plutôt que s’appesantir sur ces scientifiques s’usant les yeux sur des moniteurs vidéos, vecteurs du vide abyssal du scénario. Sauf que Dave Allen ne nourrit pas de telles ambitions. A la moindre occasion, il aère le huis-clos d’origine à la faveur des escapades meurtrières des marionnettes. Il s’autorise même un flashback, censé nous éclairer sur les origines desdites marionnettes. Des digressions qui frôlent le remplissage avant que le scénario ne reprenne peu ou prou les grandes lignes de son prédécesseur. Ainsi, Wanda et Lance mourront-ils après avoir forniqué – passage obligé de tout slasher qui se respecte – à l’instar de Carlissa et Frank dans le premier film. Néanmoins, Charlie Spralding se montrera plus généreuse que sa consœur, nous gratifiant d’un de ces moments suspendus où tous nos griefs s’évanouissent devant la beauté d’un corps. Un dévouement que ne partage pas Elizabeth Maclellan (Carolyn), plus chaste dans ses épanchements, nimbant sa relation avec le bellâtre Michael d’un parfum romantique suranné. La raison en est simple, elle incarne à son corps défendant l’Amour éternel et irraisonné, héritage victorien qui ne saurait souffrir de la trivialité d’un sein dévoilé aux yeux de tous. Le déshabillé en dentelle qu’elle arbore durant le final participe du rapprochement souhaité avec les grands classiques du fantastique, mais se heurte à la vulgarité contemporaine incarnée par son amant, torse nu et vêtu d’un simple jean. Le final confronte alors deux époques, avec comme trait d’union le geste chevaleresque de l’amant venant au secours de la belle éplorée, indémodable ressort scénaristique qui ajoute une bonne dose de conformisme à un spectacle décidément bien désuet.
Cinquième film sorti sous la bannière Full Moon, Puppet Master II entérine les méthodes à l’économie de Charles Band. La pauvreté des décors (le hall majestueux et l’ascenseur ont disparu) le dispute à la médiocrité des effets spéciaux (le matte painting de l’hôtel Bodega Bay est encore plus sale que dans le premier film, les marionnettes perdent en autonomie). Alors que les suites se veulent en général plus ambitieuses que leurs prédécesseurs, ce Puppet Master II joue le statu quo. Plus amusant encore, la persistance du travail de David Schmoeller, alors même que Charles Band a tout fait pour l’effacer des tablettes. Ainsi, non content de renvoyer au dernier acte de Puppet Master, le final de cette suite n’est pas sans évoquer Tourist Trap par la bizarrerie de ces espèces de poupées géantes à visage humain. Un joli pied de nez qui valide en somme les efforts de David Schmoeller, dont l’ombre plane sur tout le film.