CinémaComédie

Gare au percepteur – Walter Lang

gareaupercepteur

The Jackpot. 1950

Origine : Etats-Unis 
Genre : Comédie 
Réalisation : Walter Lang 
Avec : James Stewart, Barbara Hale, James Gleason, Fred Clark…

La famille Lawrence, à savoir Bill et Amy plus leurs deux enfants, gagnent tout un lot de cadeaux luxueux dans un jeu radio. Tout ce luxe débarquera, et chamboulera la vie de la famille… pour le pire. Car le couple découvrira les effets pervers de cette nouvelle façon de vivre, avec en premier lieu les impôts, qui vont augmenter en conséquence de tous ces lots d’une valeur totale de 27 000 dollars. Impayable pour la famille.

Revenant dans la comédie familiale après une courte incartade dans le western, James Stewart retrouve ici le rôle typique de l’américain moyen qu’il tenait avant guerre dans bon nombre de films signés notamment Frank Capra, et qui l’avait fait connaître. Ceci dit, en ces temps dorés du cinéma, comédie familiale ne rimait pas encore avec débilité sans fond, et Gare au percepteur s’orne aussi d’un commentaire social affirmé sur la société américaine d’après guerre, alors que la société de consommation décollait. En premier lieu, le film met donc en avant les dangers de la modernisation excessive, et prône une façon de vivre relativement simple. La vie de la famille Lawrence, au début traditionnelle, avec les époux aimants et les enfants sages, va se voir littéralement envahie d’une part par de nombreuses choses inutiles (un poney, 250 kilos de viande et autres boustiffailles en tout genre) et d’autre part par tous ces articles du modernisme et de la haute bourgeoisie : la machine à laver, le frigo, le piano, les bijoux, ainsi que tous les meubles designs apportés par un décorateur professionnel qui modifiera complètement le cadre de vie paisible de la famille pour y installer son propre goût esthétique. Les Lawrence n’auront pas leur mot à dire et subiront le contrecoup de tous ces cadeaux privilégiant l’apparence au confort, remplaçant une vie simple et modeste par toute une autre vie, plus pompeuse, moins chaleureuse, plus jalousée. Les relations entre les deux époux vont également s’en ressentir, lorsqu’une jeune et belle peintre viendra demander à Bill de poser pour elle, y consacrant ses soirées. La jalousie de Amy se fera ressentir, et l’incompréhension règnera, renforcée par tout le décorum environnant, un bordel sans nom dans laquelle de tierces personnes vont et viennent. Car entretemps, les Lawrence ont également appris qu’ils devront payer des impôts sur leurs nouvelles acquisitions, qui dès lors prennent encore davantage l’allure de cadeaux empoisonnés adressés par une radio et par ses partenaires commerciaux assurant leur promotion sur le dos de citoyens inconscients des dispositions légales du jeu, avec le consentement de l’Etat, qui au moment de prélever les taxes, ne cherche pas à savoir le pourquoi et le comment. Virtuellement ruinés dans un monde de luxe, les Lawrence devront donc logiquement chercher à revendre le plus possible, ce qui va les amener à flirter dangeureusement avec l’illégalité, poussés qu’ils l’ont été par les menaces de banqueroute. On trouve donc ici une critique à la fois du monde du commerce agressif (encore un élément se développant dans la société de consommation de l’après-guerre) et contre le système fiscal, dogmatique au possible.

Maintenant, tout ce discours est bien beau, mais il faut admettre que le film, en prônant une vie sobre et prévenante à l’égard de cette nouvelle société en mutation, reste beaucoup trop sage et ne va pas assez loin dans la frénésie absurde qui aurait pourtant si bien collé avec son intrigue. Nous ne sommes pas dans un film de Capra, et ça se sent, malgré les similitudes thématiques. L’humour est moins burlesque, plus convenu, et surtout dès le départ Walter Lang peine à rendre attachante la vie simple de la famille Lawrence, qui est pourtant celle qu’il prône. On est loin des personnages du formidable Vous ne l’emporterez pas avec vous, ou même plus simplement de Mr. Deeds… Il manque clairement ce côté fantasque qui faisait une grande part de leur charme, et qui permettait au spectateur d’adhérer totalement aux propos des films. Ici, tout est simplifié, parfois maladroit (la critique des impôts), et surtout moins idéaliste et moins émotionnel que dans les films de Capra. Bilan en demi teinte, donc. Reste un James Stewart toujours appréciable même avec son personnage trop sobre, et l’apparition d’une Natalie Wood qui incarne ici l’enfant des Lawrence.

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