Jeremiah, tome 29 : Le Petit chat est mort – Hermann
Jeremiah
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Jeremiah et Kurdy se retrouvent de nouveau dans une ville peu fréquentable. On découvre dès les premières pages les conditions de travail d’ouvriers dans une mine proches de l’esclavage. Ces derniers se rebellent lorsqu’un des leurs se blesse et qu’il est traité comme un animal. Le patron de la mine et son fils Ricky, 17 ans, viennent voir ce qui se passe. Ricky abat un des ouvriers car il ne tolère pas cette légère insurrection.
Kurdy boit un coup en ville et croise Julius (voir Julius et Romea) qui s’apitoie sur son sort car Romea l’a quitté. Pendant ce temps, Jeremiah rend visite à Léna et sa famille, c’est-à-dire un mari gras du bide alcoolique et un garçonnet qui a tendance à trop serrer son chaton par le cou.
De retour en ville pour rejoindre Kurdy, Jeremiah prend la défense d’un ouvrier qui s’en prend verbalement à Ricky venu boire un verre dans un bar avec ses gardes du corps. Jeremiah tue le garde d’un seul coup de poing. Alors que Ricky s’apprête à sortir son arme, la police intervient. Ricky promet d’avoir la peau de Jeremiah.
Ce 29ème tome des aventures de Jeremiah (et accessoirement Kurdy), fait suite à un Esra va très bien de grande qualité. Hermann reprend donc sa série et place ses personnages fétiches au milieu d’une nouvelle situation qui ne les concerne pas mais dont ils vont devoir néanmoins se tirer. Cette fois pourtant, ça sera différent. En effet, Jeremiah est victime de Ricky, jeune psychopathe imbu de pouvoir qui n’hésite pas à enlever l’enfant de Léna pour que Jeremiah se rende à lui. Il souhaite le torturer pour l’avoir ainsi offensé.
Différent parce que Jeremiah se trouve confronté à un dilemme. Toujours amoureux de Léna, et elle sans doute encore de lui, il voit ce qu’aurait pu être sa vie s’il avait choisi de rester avec cette dernière plutôt que de suivre Kurdy. Hermann nous montre ainsi un autre visage de son personnage. Il souhaite le confronter à ce qu’aurait pu être sa réalité. Là où c’est intéressant aussi, c’est que Jeremiah est piégé. Cet enlèvement ne lui laisse d’autre choix que de se livrer et ainsi se sacrifier. Il rejette Kurdy pour que ce dernier ne vienne pas s’interposer et risquer de faire tuer l’enfant de Léna.
Là-aussi, Hermann développe un peu son Kurdy en approfondissant son lien avec Jeremiah, qu’il n’est pas prêt à laisser tomber.
Néanmoins, tout au long du récit, une légère sensation s’immisce dans notre lecture. Et si Jeremiah regrettait ses choix ? Et s’il arrêtait de courir partout pour vivre cette vie qu’il aurait pu avoir ? Jeremiah fera donc un choix après tout un épisode de véritable introspection. Peut-être que jamais jusque-là, Hermann n’avait autant développé la psychologie de son personnage.
Et plus étrange encore, à la fin de ce tome, je me suis laissé dire que cette série pourrait peut-être bien se terminer comme ça, tellement il semble que tout est dit ici.
Hermann signe là un 29ème épisode des aventures de Jeremiah (et accessoirement Kurdy) terriblement bien foutu ! Il gère l’ambiance de son récit avec brio, nous permettant de suivre les émeutes d’ouvriers contre un système tyrannique. Le retour de Julius n’apporte pas grand-chose à l’histoire, sinon qu’il tient compagnie à Kurdy. Cependant, il n’est pas de trop. Il met un peu de légèreté dans cet épisode terriblement noir.
Encore une fois, Hermann se sert de son dessin avec justesse pour raconter une histoire certes pas originale (pas de mystères comme dans le précédent tome), mais qu’il dirige d’une main de maître. Encore un bon cru de la part de cet auteur majeur de la bande-dessinée.