Le Fantôme de Milburn – John Irvin
Ghost story. 1981Origine : États-Unis
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La “Chowder society” est un petit cercle composé de quatre notables approchant l’âge de la retraite. Ceux-ci se réunissent régulièrement afin de se raconter des histoires effrayantes.
Mais voici qu’un beau jour l’un d’eux trouve la mort dans de bien étranges circonstances. Cette fin tragique aura de funestes conséquences pour la Chowder society qui se retrouve subitement confrontée à un passé qu’elle aurait préféré oublier…
Voici, résumée hâtivement l’histoire qu’imagine Peter Straub dans son livre Ghost Story et dont les grandes lignes servent de base à l’élaboration du Fantôme de Milburn. L’adaptation est tout de même relativement fidèle au livre, tout en ayant recourt à d’obligatoires ellipses pour faire raconter le roman fleuve de Straub dans la durée réglementaire de 110 minutes. C’est le jeune réalisateur anglais John Irvin qui se charge de réaliser le film. Déjà réalisateur du très sympathique film de mercenaires Les Chiens de guerre mettant en scène Christopher Walken et de quelques productions d’horreur pour la télévision anglaise, Irvin ne se retrouve donc pas tout à fait en terrain inconnu. Et force est de reconnaître qu’il ne s’en tire effectivement pas trop mal pour ce film là.
Ce qui marque en premier lieu c’est cette atmosphère cossue qui met bien en valeur les vallées enneigées et les intérieurs lambrissés de la Nouvelle Angleterre. Pour un peu, on pourrait presque dire que Irvin parvient à faire revivre le charme suranné des films de la glorieuse Hammer. Et on peut à plus forte raison placer Le Fantôme de Milburn dans la lignée des films gothiques de la firme anglaise. Le réalisateur semble soucieux de réaliser un film d’épouvante “à l’ancienne”, préconisant une mise en scène sobre et classique, une mise en valeur des décors et une économie des effets spéciaux.
Pourtant ces derniers, signés Dick Smith, sont de très haute tenue et n’ont que peu vieilli. On retiendra surtout les impressionnantes apparitions du fantôme et de son visage en état de décomposition. Soyons sûrs qu’à l’époque de la sortie du film elles ont dû faire leur petit effet.
Outre les décors et la parcimonie en matière d’effets sanglants, ce sont les acteurs, et principalement les quatre vieux héros, qui donnent à ce film cette allure classique. En effet, tous les quatre sont de vieux acteurs à la longue carrière ayant commencé leur métier sur les planches du théâtre. Le film bénéficie donc d’une interprétation de qualité, avec notamment la présence de Fred Astaire pour son tout dernier rôle !
Mais en dépit de toutes ces évidentes qualités, le film n’arrive jamais à susciter plus qu’un enthousiasme modéré chez le spectateur. Ce fait est principalement dû à la mauvaise gestion du scénario. Le matériau de base était pourtant riche et audacieux. Le livre de Straub fourmillait d’idées excellentes et avait réussi à rendre passionnante de bout en bout une histoire aux multiples intrigues secondaires et aux enjeux nombreux. C’est dans ce système complexe mais cohérent de sous intrigues que le film se noie. Le scénariste a eu certes la judicieuse idée d’élaguer considérablement l’intrigue, mais ce faisant il lui a ôté une grande partie de sa saveur. Il a été obligé de conserver certains personnages pour la cohérence de l’intrigue principale, mais leur a ôté tout intérêt en supprimant leurs histoires personnelles du film. Ainsi des personnages comme Gregory Bates et son frère ne sont plus que de vagues seconds couteaux sous exploités. De même l’histoire du « fantôme » perd beaucoup de ses méandres tortueux qui lui donnaient tout son sel. Et là où Peter Straub avait réussi à créer dans son livre une créature inédite à la puissance effrayante n’ayant que peu de rapports avec les fantômes classiques, le film ne nous raconte finalement qu’une banale histoire de revenant comme il y en a tant d’autres.
Bref, Le Fantôme de Milburn reste un film plutôt distrayant qui vaut le coup d’être vu pour son atmosphère singulière, ses effets spéciaux honorables et son quatuor d’acteurs de grand talent. Toutefois l’ensemble reste quelque peu timoré et le film aurait grandement gagné à être moins sobre et plus ambitieux.