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Assassin en sous-sol – Jenö Hodi

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Deadly Obsession. 1989

Origine : Etats-Unis 
Genre : Thriller 
Réalisation : Jenö Hodi 
Avec : Darnell Martin, Joe Paradise, Jeffrey R. Iorio, Martin Haber…

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Le doyen d’une université américaine subit l’odieux chantage d’un inconnu qui lui réclame un million de dollars sous peine de voir ses étudiants décimés par de la nourriture empoisonnée. Et pour prouver le bien-fondé de sa menace, l’homme qui se fait appeler John Doe (Joe Paradise) et qui a élu domicile dans les sous-sols du campus, a déjà empoisonné un pot de glace au chocolat qui vient tout juste d’être acheté par une étudiante nommée Denise (Darnell Martin). Retrouvée juste à temps, elle échappe à la mort. Mais ses sauveteurs arrivent trop tard pour mettre la main sur l’assassin, qui avait eu la malencontreuse idée de venir voir sa victime pendant son agonie. Heureusement pour lui, Denise ne se souvient plus de ce qu’elle a vu. N’empêche qu’il faudrait quand même la mettre hors d’état de nuire avant que la mémoire ne lui revienne. Pour la protéger, la police délègue sur place l’agent Dino Andretti (Jeffrey R. Iorio) qui se fait passer pour l’ami de Denise, car toute cette affaire doit rester secrète.

Si plusieurs choses vous ont parus incohérentes ou absurdes à la lecture de ce résumé, c’est normal. Les approximations, Assassin en sous-sol (que l’on trouve aussi sous le titre Obsession mortelle) les accumule durant une bonne demi-heure. Dès le générique et ses noms qui s’incrustent sur l’écran en parasitant une scène d’action (laquelle n’a d’ailleurs aucune utilité et ne concerne pas le sujet du film), on remarque que quelque chose cloche. C’est le point d’embarquement pour ce qui prendra très vite l’allure d’une série Z. Le scénario n’a aucun sens : pourquoi le tueur prévient-il le doyen juste avant que sa première victime ne soit effectivement trépassée ? Pourquoi juste après cet appel a-t-il l’idée de se rendre dans l’appartement de Denise ? Pourquoi ne l’achève-t-il pas alors qu’il voit bien qu’elle est encore en vie ? Pourquoi la police autorise-t-elle Denise à rester sur place ? Comment est-il possible que Pamela, la colocataire de Denise, ne soit pas intriguée par ce pseudo ami sorti de nulle part et qui leur colle aux basques ? D’ailleurs pourquoi ne l’a-t-on pas mise au courant ? Et puis cette histoire d’amnésie, n’est-ce pas un peu gros ? Il est évident que le cinéma requiert un minimum d’indulgence envers ce genre d’égarements, mais compte tenu de leur extrême densité au sein de cette demi-heure il est difficile de pardonner à Assassin en sous-sol. D’autant plus que d’autres défauts sautent aux yeux de la même façon que le rat cobaye crache du sang au visage du tueur. Il y a par exemple l’attitude prise par ce flic pour faire croire qu’il est bien un étudiant… Visiblement trop friand de comédies adolescentes, il se montre d’une lubricité franchement pas à sa place dans un thriller qui se veut malsain. Et vas-y que je fais des remarques sur “les deux flingues”, et vas y que je déballe les sous-vêtements de ma protégée en la narguant quand elle veut s’habiller, et vas-y que je veux qu’elle m’arrange un coup avec une de ses cousines de préférences à gros seins et vas-y que je déballe mon attirail à sa colocataire… Crédible, le flic. Autant dans le cadre de sa mission que dans celle du film. Il participe en fait à une volonté plus globale de concentrer au début du film les éléments sexy, plus aptes à trouver un public, comme si le réalisateur sacrifiait sciemment cette première partie pour mieux se concentrer sur la seconde, qui se veut plus sérieuse. Mais avant que nous n’en arrivions là, nous avons également droit à une scène de dialogues dans les vestiaires des filles et surtout à une scène de douche qui est également l’occasion pour Jenö Hodi de prouver au mieux son je m’en foutisme, au pire son amateurisme puisqu’il réussit l’exploit de laisser traîner ostensiblement dans le cadre les caches dissimulant l’intimité de son actrice tout en ayant recours par le montage à de grossiers gros plans sur la poitrine de ce qui est par conséquent une doublure. Accessoires qui traînent, montage irréfléchi, racolage, cette scène est pourtant l’une des plus importantes du film puisque c’est là que le tueur rencontre Denise. Difficile après ça de se remettre sur de bons rails.

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C’est que même si elle est davantage soignée, et ce principalement parce que le scénario se simplifie en simples chasses à l’homme, une telle somme de défauts ne peut être sans garder quelques subsistances. La première d’entre elle est le flic protecteur, qui après une première anicroche (il dormait et Denise en a profité avec sa copine pour faire un tour à la piscine… la nuit… seules… forcément, le tueur rôdait et s’en est aperçu) s’est transformé en prince galant et a noué une relation amoureuse avec l’étudiante. Tout comme son alibi d’étudiant était grossier, cette image du chevalier servant est trop poussée pour convaincre. Hodi ne trouve en fait pas de fonction au personnage, qu’il envoie courir systématiquement et avec un train de retard derrière Denise, si possible en prenant la pose du chien fou. Comme si appuyer sur les caractéristiques du personnage permettait de le faire exister davantage… Son histoire d’amour et les conséquences qu’elle entraîne -principalement l’inimitié accentuée entre lui et son chef, avec lequel il s’entendait déjà mal- prend l’allure d’une digression au sein d’une intrigue qui pourrait très bien se limiter aux deux personnages de Denise et de John Doe. Car à choisir, ce sont ces scènes qui entre la virée à la piscine et celle dans le sous-sol du bahut occupent pratiquement toute la seconde moitié du film qui sont encore les plus réussies. Hodi parvient à utiliser les couloirs sombres, les pièces désertes et les locaux techniques aux allures industrielles pour composer des séquences efficaces, tendues et angoissantes que chaque interruption (les retours aux flics, notamment) nous fait regretter. Pour autant, il est encore loin d’atteindre l’atmosphère malsaine qu’il recherchait, faute que l’on attribuera à un manque d’expérience généralisé à une grande partie de ses collaborateurs et du casting. Par exemple la musique, composée de quelques notes au synthétiseur, devient vite énervante. Ou encore les dialogues, regorgeant du même genre d’imbécilités à base de sarcasmes que l’on trouve dans les slashers, qui eux ont au moins le mérite de jouer sur le second degré. Ce n’est pas le cas ici, ce qui n’arrive qu’à faire ressortir davantage le jeu de Joe Paradise, qui en fait d’ailleurs un peu trop pour donner forme au vicieux John Doe. La voix mielleuse dont il est affligé dans la version française n’arrange pas ses mimiques faciales probablement inspirées par Jack Nicholson.

Quoique sauvé de la nullité par une seconde partie plus directe, et donc moins propice aux bêtises, Assassin en sous-sol ne sort jamais de la médiocrité. Passé à l’ouest en 1982, le hongrois Jenö Hodi signe un premier film guère encourageant et qui n’a certainement pas dû ravir Brian De Palma, un des réalisateurs auprès desquels il travailla dans le cadre de ses études. Même si il parvient à montrer à l’occasion de belles dispositions pour la mise en scène, il aurait peut-être dû attendre de finir sa formation avant de jouer les réalisateurs, scénaristes et producteurs. Il ne perça jamais vraiment dans l’une de ces trois activités, par contre il utilisa sa nationalité hongroise pour fonder une compagnie destinée à épauler les co-productions désireuses de trouver des fonds et des techniciens européens. Quant à Darnell Martin, l’actrice principale dont la prestation n’a pourtant rien de déshonorante, elle s’en ira changer de filière et, après avoir fait ses armes comme assistante de Spike Lee sur Do the Right Thing, elle deviendra une téléaste réputée à l’œuvre pour des épisodes de séries à succès comme Oz, Urgences, Grey’s anatomy, New York – Section criminelle et Le Mentaliste.

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