CinémaHorreurThriller

Torso – Sergio Martino

torso

I corpi presentano tracce di violenza carnale. 1973

Origine : Italie 
Genre : Giallo 
Réalisation : Sergio Martino 
Avec : Suzy Kendall, Tina Aumont, John Richardson, Roberto Bisacco…

Une bande de jeunes étudiantes de Pérouse semble être la proie d’un tueur ganté et masqué. Pendant que la police enquête, les survivantes partent s’isoler à la campagne dans la villa du père de l’une d’elle. Mais le tueur les a suivies jusque là.

Voici donc un scénario plutôt léger, comme souvent pour les giallos. D’habitude, la différence entre ces thrillers italiens et leurs contreparties américaines d’une décennie plus tard, plus communément appelées “slashers”, tient dans la différence entre le maniérisme graphique des réalisateurs du pays d’Antonio Gramsci et le style volontiers beauf et raccoleur des artisans de l’Oncle Sam. Dans Torso, Sergio Martino se trouve à mi-chemin entre ces deux courants, obtenant un résultat plutôt pas mal. Son scénario peu élaboré présente pourtant son lot d’incohérences et de personnages de jeunes filles délurées à l’intelligence relative voir inexistante (ces jeunes post-hippies détestent tellement la police que personne ne cherche jamais à la contacter, dites donc !). Si deux héroïnes se démarquent des autres, cela tient à deux choses : déjà elles bénéficient tout simplement d’un temps d’apparition à l’écran plus long que celui de leurs amies, qui ne parlent d’ailleurs pratiquement jamais. Puis, et c’est certainement la chose la plus évocatrice des slashers, elles sont les moins promptes à tomber la culotte. Faut-il en deviner que le tueur auquel elles ont affaire est le papa spirituel de Jason Voorhees ? Et bien non. Martino montre bien entendu plus que de raison les seins ou les fesses de ses actrices, il les déshabille pour un rien et il les fait coucher comme il se doit avec leurs copains sur la banquette arrière de leurs voitures, mais pourtant il n’utilise pas seulement cet érotisme en temps que moyen d’attirer les spectateurs. C’est que l’histoire concerne justement toute la liberté sexuelle héritée de la fin des années 60. Tous les suspects auront ainsi comme potentiel mobile des meurtres leur relation difficile avec cette génération de filles assumant leurs corps, se promenant en mini-jupes. Les plus vieux assassins présumés assistent avec elles à l’arrivée d’une nouvelle morale à laquelle leur éducation plus puritaine ne les avait pas préparés. En conséquence, le voyeurisme est de la partie, et même ceux qui se révéleront innocents s’y adonnent. Parmis les plus jeunes mâles venus de la ville, il n’y aura qu’un suspect : un jeune homme éconduit par l’une des héroïnes depuis plus longtemps que sa patience ne peut le supporter. Il ira presque jusqu’à la violer, et bien entendu cela le portera haut placé sur la liste des coupables probables (ce qui n’est donc pas assez pour que quelqu’un en parle à la police). Et puis il y a bien entendu les jeunes campagnards que rejoignent les donzelles en vacances : ils n’ont pas l’habitude de voir de telles filles, et leurs sens en sont tout émoustillés. Martino se permet d’ailleurs quelques petites scènes comiques, avec ce laitier venant pour livrer ses produits pendant un bain de soleil des jeunes filles dans leur jardin. Si les jeunes bouseux sont d’office innocentés (puisqu’ils n’étaient pas à Pérouse), cela n’empêche qu’il y aura beaucoup de suspects. Mais, et c’était prévisible, l’assassin démasqué en fin de film sera celui qu’on suspectait le moins, et qui du reste se sera absenté pendant plus d’une heure de métrage. L’absence de ce bonhomme nous aura donc préalablement mis sur la voie, et il ne restera donc plus qu’à deviner son réel mobile, qui sans surprise vu les flashbacks sur des poupées de cire éborgnées et vu le classicisme de la chose, sera lié à un traumatisme freudien.

Mais tout ceci nous ferait presque oublier les meurtres en eux-même, et le fameux manérisme avec lequel les réalisateurs de giallos se doivent d’oeuvrer pour donner un minimum de relief. Martino peut déjà se targuer d’avoir choisi de très beaux lieux de tournage, dans une ville d’art aux petites rues sinueuses typiquement italiennes et dans un village aux maisons décrépites qui confèrent à Torso une atmosphère étrange, assez loin du style plus coloré et surréaliste d’un réalisateur comme Dario Argento. En terme de syle, le point d’orgue du film interviendra assez tôt, lorsqu’une jeune fille sera traquée puis assassinée au petit matin dans une forêt de bouleaux boueuse et brumeuse. Superbe. Les autres meurtres seront plus classiques et réalistes, du moins quand ils ne seront pas laissés hors champ pour faire plus tard découvrir les corps par une héroïne toute surprise de voir trois cadavres dans son lieu de villégiature. Elle le sera encore plus lorsqu’elle verra, cachée, que le tueur mutile les cadavres.

C’est assurément un bon giallo que Martino nous a pondu là. Le scénario plus que limite est contrebalancé par un climat de tension érotique permanent, habilement conduit pour faire du voyeurisme le synonyme du meurtre. Ce qui, relevé par une sauce réaliste sans être fade, tend un peu à faire songer au Mais qu’avez vous-fait à Solange ? réalisé l’année précédente par Damiano Damiani. Une bonne référence.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.