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Seize bougies pour Sam – John Hughes

Sixteen Candles. 1984

Origine : États-Unis
Genre : Anniversaire mouvementé
Réalisation : John Hughes
Avec : Molly Ringwald, Michael Schoeffling, Anthony Michael Hall, Haviland Morris, Gedde Watanabe, Paul Dooley.

En ce jour anniversaire où Samantha Baker atteint les 16 printemps, rien ne se déroule comme elle le souhaiterait. Pas un membre de sa famille pense à lui souhaiter un joyeux anniversaire, trop préoccupés par le mariage de sa sœur aînée qui se profile. Reste le bal du lycée pour sauver sa journée. Or, plus bouleversée qu’elle veut bien se l’avouer à l’idée de paraître aussi insignifiante aux yeux de sa famille et constamment enquiquinée par un puceau en rut qui la drague lourdement, elle ne s’aperçoit pas de l’intérêt qu’elle suscite chez Jake, le beau gosse du lycée dont elle est éperdument amoureuse. Sa journée est-elle vouée à finir aussi mal qu’elle a commencé ?

Parfois, une carrière ne tient qu’à un heureux concours de circonstances. Celle de John Hughes a pris son envol parce qu’il a eu la chance de se trouver au bon endroit au bon moment, en l’occurrence au sein du comité de rédaction du magazine humoristique National Lampoon au crépuscule des années 70. A partir du succès de American College (National Lampoon’s Animal House – 1978), de nombreux films sont sortis sous l’égide du magazine dont Bonjour les vacances (National Lampoon’s Vacation – 1983) écrit par ses soins. Ce film lui sert de déclic et dès l’année suivante, il décide de mettre lui-même en images ses propres scénarios. Œuvre séminale, Seize bougies pour Sam joue encore la carte de l’humour potache mais nimbé d’une touche de gravité, à l’échelle adolescente s’entend, faisant de la débutante Molly Ringwald l’héroïne de toute une génération.

Le cinéma des années 80 en réservent de belles aux adolescents américains. Certains rencontrent des extraterrestres (ExplorersStarfighter) quand d’autres découvrent que leur voisin est un vampire (Vampire… vous avez dit vampire?). Et pourtant tout cela n’est rien comparé à ce qui arrive à Sam, totalement oubliée par toute sa famille. Non pas à la manière de Kevin dans Maman, j’ai raté l’avion ! mais de façon plus pernicieuse. Le jour de ses 16 ans, première étape vers la maturité et surtout d’un début d’indépendance avec la possibilité qui est donnée aux adolescents américains de prendre le volant, ce qui aurait dû être une fête devient un jour comme tant d’autres. Tous les membres de sa famille la salue comme si de rien n’était, personne ne semblant se rappeler de l’importance de cette journée à ses yeux. Et pour cause, tout le monde dans la demeure familiale a l’esprit tourné vers Ginny, sa sœur aînée en passe de se marier. Une attitude qui aurait tôt fait de raviver les rancœurs, souvent inévitables entre deux sœurs. Mais pas ici. Sam nourrit davantage d’animosité envers son frère, le moqueur Mike, qu’envers sa grande sœur dont le départ imminent tend à laisser vacante la place de l’aînée de la fratrie. Pour John Hughes, le mariage de la sœur aînée revêt deux intérêts, d’inégale importance. D’une part, il lui permet d’expliquer l’oubli familial et d’autre part, il lui offre la possibilité de se moquer gentiment de ce saint sacrement sur la base d’un futur marié beauf à souhait (John Kapelos, l’agent d’entretien plein de bon sens de Breakfast Club) et d’une mariée complètement ailleurs au moment de se présenter devant l’autel. Et tout le film se construit ainsi, entre gags lourdauds et auscultation assez juste des affres de l’adolescence.
Tout ce qui touche à Sam et à ses préoccupations du moment bénéficie de la justesse du regard de John Hughes. L’héroïne s’impose en prototype de l’adolescente mal dans sa peau, qui se sent insignifiante et mal aimée (ce à quoi la renvoie l’oubli de son anniversaire). Ne supportant pas ses formes de petite fille, lesquelles sont moquées par son frère et évoquées de manière amusée par ses grands-parents, elle observe avec envie sa camarade Caroline dont le corps sculptural lui vaut d’attirer tous les regards et surtout de sortir avec Jake. En comparaison, Sam ne se sent pas assez femme et donc ne peut pas envisager que Jake puisse être charmé. Son existence se résume à n’être que la cible de puceaux tiraillés par leurs hormones, à l’image de Ted (Anthony Michael Hall, autre acteur fétiche du réalisateur), horripilant garnement qui ne comprend pas le sens du mot « non ». En ces temps de #MeToo et autre #BalanceTonPorc, son insistance vaudrait procès. Ce personnage, qui semble voué au départ à n’être qu’un personnage satellite, s’impose au récit comme il s’impose auprès de Sam. Ted appartient à cette caste communément appelée les geeks, en fait les laissés pour compte car pas très populaires et ne cherchant pas à l’être. Lui tente de s’affranchir de son groupe et pour cela, rien ne vaut la conquête d’un représentant du sexe faible. Peu lui importe d’être éconduit tant qu’il peut ramener un trophée pour se faire mousser auprès de ses amis, en l’occurrence la petite culotte de Sam qu’il aura su habilement négocier à défaut d’obtenir ses faveurs. Un fond de misogynie parcourt tout le film dans la manière qu’ont les garçons de traiter les filles. John Hughes fait faire et dire des choses à ses personnages masculins (Ted qui tente d’embrasser Sam de force, Jake qui déclare qu’il pourrait violer Caroline de dix manières différentes tant celle-ci est folle de lui) prompts à provoquer la levée de boucliers des ligues de vertus si le film sortait à l’époque actuelle. On peut arguer que John Hughes a la main lourde même si ces propos et ces comportements déplacés révèlent surtout la forfanterie de ces messieurs, toujours à se vanter et à vouloir prouver qu’ils ont la plus longue. Il retranscrit une certaine réalité dans les rapports entre adolescents, lesquels s’embarrassent guère des conventions sociales et du politiquement correct (un trouillard sera immanquablement traité de tapette). Néanmoins, John Hughes confère également une dimension de conte de fées à son récit. Malgré tous ses déboires, Sam finit par trouver son prince charmant quand Ted se persuade qu’il a rompu avec le signe indien au bras d’une Caroline en état d’ébriété avancée. Quel est la part du rêve et de la réalité, John Hughes se garde bien de trancher, concluant l’arc narratif de Ted de manière à ce que la question reste en suspens.

Pour sa première réalisation, John Hughes peine à trouver le bon dosage entre la comédie de mœurs et la gaudriole propre aux teen movies. Il pousse même le bouchon loin dans l’absurde dans le sillage de Long Duk Dong, caution exotique du récit qui a droit à un traitement pour le moins caricatural, notamment lorsqu’un gong retentit à chacune de ses apparitions. Seize bougies pour Sam synthétise tout ce qu’il développera par la suite lors de ses trois prochains films avec la fraîcheur des premières fois. Si ce film ne s’avère guère amusant en dépit des efforts employés, il faut reconnaître à John Hughes son sens du casting. Aux jeunes acteurs déjà mentionnés, s’ajoutent John et sa sœur Joan Cusack, le premier en ami de Ted et la seconde en pauvre fille entravée par un appareil dentaire disgrâcieux.

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