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L’Ile des adieux – Franklin J. Schaffner

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Islands in the stream. 1977

Origine : Etats-Unis
Genre : Drame
Réalisation : Franklin J. Schaffner
Avec : George C. Scott, David Hemmings, Gilbert Roland, Susan Tyrell…

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Alors que la guerre fait toujours rage en cette année 1940, les Bahamas demeurent un havre de paix que la clameur lointaine des combats perturbe peu. Thomas Hudson, sculpteur deux fois mariés pour autant de divorces, y a trouvé refuge pour échapper à ses responsabilités. Cependant, celles-ci se rappellent à lui à l’occasion de la venue de ses enfants durant les vacances d’été. Cela génère en lui une profonde angoisse, que même l’alcool ne suffit à apaiser.

L’Île des adieux s’inspire d’un roman de Ernest Hemingway intitulé Îles à la dérive, et dont la publication a eu lieu à titre posthume en 1970. Il s’agit de son roman le plus autobiographique. Il constitue en quelque sorte une synthèse de toute son œuvre. Comme pour mieux souligner les origines littéraires de son film, Franklin J.Schaffner le segmente en trois chapitres, les trois derniers chapitres de la vie bien remplie de Thomas Hudson. L’Île des adieux marque les retrouvailles entre Franklin J.Schaffner et George C.Scott, tous deux oscarisés pour Patton. Cette fois-ci, le comédien joue moins de son imposante stature au profit d’une interprétation plus délicate qui donne la part belle à la fragilité de son personnage. Sous des dehors affables et sereins, Thomas Hudson cache au plus profond de lui bien des blessures. Même si son amour pour l’île dans laquelle il vit paraît sincère, elle n’en constitue pas moins une échappatoire. Cet endroit idyllique donne l’impression d’une existence heureuse, là où ne réside en réalité qu’une pointe de tristesse et des remords que les péripéties du film mettent en lumière.

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Sur l’île, Thomas retrouve une certaine forme de liberté qui confine à l’immaturité. Ses journées se composent inlassablement de parcimonieux instants consacrés à son travail de sculpteur (ses sculptures constituent son unique source de revenus), de folles soirées arrosées, et de grandes parties de pêche au large avec son ami Eddy. Ce dernier, tout aussi inconséquent que lui, souffre d’alcoolisme mais se refuse à l’admettre. Thomas lui-même participe de ce déni en ne lui disant pas la vérité en face. Il ne le fera que bien plus tard, lorsqu’il aura pleinement accepté son rôle de père et pris conscience de ses erreurs. Avant cela, il profite de sa dernière soirée avant longtemps en homme seul pour s’enivrer et se donner en spectacle. Ce sont les derniers soubresauts d’un garnement avant son passage à l’âge adulte. Le jour J, il retarde au maximum les retrouvailles avec sa progéniture, trahissant ses difficultés à renouer avec les responsabilités inhérentes au rôle de père. Contre toute attente, ces fameuses retrouvailles s’effectuent le plus normalement du monde, et avec beaucoup de chaleur en ce qui concerne son aîné, Tommy, et son cadet, Andrew. Toutefois, des ressentiments demeurent et perturbent plus profondément Davy, le petit deuxième, lequel, de surcroît, se trouve en pleine puberté. Cela fait beaucoup de choses à gérer pour ce petit gars. Ces ressentiments éclatent au grand jour lors d’une très belle scène qui transforme une joyeuse bataille d’oreillers en un déchirant cri du cœur de la part de Davy, ce dernier s’épuisant à rouer de coups son père. Cela ne traduit nullement une haine tenace à son égard, mais plutôt l’ardent reproche d’une absence qui pèse de plus en plus. En un sens, Davy se sent responsable du départ de son père, et il cherche à se racheter par tous les moyens. Ce désir devient criant lors d’une partie de pêche au large, scène qui fait écho au Vieil homme et la mer, l’un des romans les plus célèbres de Ernest Hemingway. Aux prises avec un espadon, Davy montre toute sa détermination en allant au bout de lui-même pour le ramener à bord. Ce n’est pas tant le poisson qui le motive, que l’admiration que ne manquera pas de susciter cette belle prise auprès de son père. Comme dans Le Vieil homme et la mer, ce combat acharné entre l’homme et la nature symbolise ce besoin de croire en ses capacités, en sa valeur. Autour de cette lutte entre Davy et le poisson, c’est toute une famille qui vibre à l’unisson pour la première fois. Davy ne parvient pas à ramener l’espadon, mais son combat n’a pas été vain puisqu’il lui permet d’enfin communier avec son père, et de lire dans ses yeux toute l’affection qu’il lui porte. A l’issue de ces vacances, Thomas a redécouvert les joies d’être père. Les peines aussi, lorsque Tommy lui annonce sa volonté d’intégrer l’armée de l’air pour combattre les Allemands. Alors que d’habitude, c’est lui qui part, là, c’est son fils qui fait ce choix et cela lui est très douloureux. Ses enfants repartis sur le continent, sa solitude lui pèse, et il vit leur absence comme un manque. Cette parenthèse dans sa vie de patachon lui a fait comprendre tout ce qu’il avait raté.

Sous cette forme en trois actes, L’Île des adieux s’apparente aux derniers souhaits d’un homme qui se sait condamné. Dans un dernier élan, il revoit les personnes qui lui sont le plus chères. Ses enfants, donc, mais aussi Audrey, sa première épouse, et la seule femme dont il fut véritablement amoureux. Ils éprouvent toujours des sentiments très forts l’un pour l’autre mais jamais ils ne revivront ensemble. Ils ont tourné la page, et Audrey s’apprête d’ailleurs à en débuter une nouvelle avec un autre homme. Sa visite scelle définitivement leur relation puisqu’elle vient lui annoncer la mort de leur fils, le seul lien qui les unissait encore. Nous ne voyons pas grand chose de la guerre qui se déroule, quelques explosions de cargos à l’horizon (et leurs débris et cadavres qui s’échouent sur la plage) et des réfugiés qui transitent par l’île, principalement. Pourtant, son ombre plane sur tout le film et frappe brutalement, prouvant ainsi qu’on ne peut lui échapper. A sa manière, Thomas finit par y participer, et c’est ce qui scellera son destin lors d’une action teintée du réel besoin de s’amender pour ses errances, et de la souffrance qu’il a infligée à ses proches.

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Des trois chapitres qui composent L’Île des adieux, le premier, baptisé “Les garçons”, constitue le meilleur d’un film par ailleurs très lent et guère aidé par une mise en scène passe-partout et sans saveur. Au niveau de la réalisation, Franklin J. Schaffner se contente de quelques plans “carte postale”, se concentrant davantage sur ses comédiens. Sur ce plan là, L’Île des adieux est une réussite et bénéficie d’une très bonne interprétation, parfaitement homogène, y compris de la part des plus jeunes acteurs. Dommage qu’il manque un peu de passion et de punch à ces derniers jours d’un homme qui prend conscience de l’impasse dans laquelle ses choix l’ont entraîné.

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