CinémaHorreur

L’Autoroute de l’enfer – Ate de Jong

autoroutedelenfer

Highway to Hell. 1991

Origine : Etats-Unis 
Genre : Road movie horrifique 
Réalisation : Ate de Jong 
Avec : Chad Lowe, Kristy Swanson, Patrick Bergin, Adam Storke…

En route pour Las Vegas au nez et à la barbe de leurs parents, Charlie et Rachel (Chad Lowe et Kristy Swanson) choisissent de prendre une route de campagne pour éviter de se faire intercepter par la police. Peine perdue : sorti de nulle part, un inquiétant flic débarque, kidnappe Rachel et disparaît avec elle sans laisser de trace. Le vieux pompiste de la dernière station service les avait bien prévenu de faire attention à cette route. Charlie revient donc à lui pour en savoir plus. Il s’avère que Rachel n’est pas la première à disparaître ainsi : le flic de l’enfer débarque régulièrement dans notre monde pour amener des vierges au diable. Si il veut retrouver sa future épouse, Charlie doit lui aussi trouver le chemin de l’enfer et si possible retrouver le flic avant qu’il ne parvienne jusqu’au diable. Pas une mince affaire compte tenu des énergumènes qui peuplent les lieux.

Appeler son film “Highway to Hell” est une bien lourde charge. Récemment débarqué de ses Pays-Bas natals -il y retournera très bientôt (outre L’Autoroute de l’enfer, il n’a réalisé aux Etats-Unis qu’une comédie avec Phoebe Cates et un épisode de Miami Vice)- Ate de Jong hérite de la conception cette série B dont le titre reprend sans vergogne celui de la chanson d’AC/DC, laissant immédiatement imaginer un quelconque lien de parenté avec le groupe australien, ou du moins avec sa plus célèbre chanson. Ce ne serait pas la première fois qu’AC/DC inspire le cinéma, puisque le Maximum Overdrive de Stephen King se voulait davantage un film rock’n’roll rythmé par les compères des frères Young qu’une adaptation de la nouvelle issue de Danse macabre. Le résultat n’était pas fameux. Pour sa part, L’Autoroute de l’enfer n’a même pas le moyen de ses ambitions, AC/DC étant totalement absent de la bande originale. Dommage car leur musique n’aurait pas fait tâche et aurait permis de relever le niveau d’une musique certes rock, mais aux consonances plus évocatrices des chevelus pour radios FM que du blues rock transpirant. Mais que voulez-vous, on fait avec ses moyens… Dans le même ordre d’idées, il est regrettable que le film ne puisse faire partager la chaleur étouffante qui en plus de coller aux racines rock du scénario aurait certainement contribué à crédibiliser davantage l’enfer traversé par son personnage principal dans sa voiture des années 50. Les “road movies” se basent en grande partie sur l’influence de leur climat, et L’Autoroute de l’enfer encore plus que les autres en raison du lieu où il est censé se dérouler. Quoi qu’il ne faille pas non plus prendre l’enfer d’Ate de Jong trop au sérieux, tout comme il ne faut pas non plus prendre pour argent comptant les références démoniaques dans l’œuvre d’AC/DC. Dans les deux cas, l’enfer (en fait les tournées pour AC/DC) n’est rien d’autre que l’équivalent d’une vie faite de plaisir, d’amusement et de liberté, loin du moralisme chrétien et des bonnes mœurs sociales. Une vie rock’n’roll, tout bêtement. Ce dont Charlie et Rachel ne profitent pas, eux les deux petits jeunes à la présentation impeccable, qui refusent de consommer leur union avant le mariage. C’est d’ailleurs peut-être cette attente qui les a poussé à fuir maman et papa pour se marier vite fait à Las Vegas. Dans ce cas, être attirés dans un enfer semblable à celui imaginé par AC/DC n’est que l’illustration de ce dévergondage qui reste encore à assumer. Même si la fin du film ne répond pas exactement aux attentes de cette quête initiatique (disons le de suite : Rachel et Charlie sont toujours aussi sages et puceaux en fin de film… et ils auront même ramené un gosse avec eux), on ne peut que voir la symbolique créée par le scénario de Brian Helgeland, dont le passif cinématographique à l’époque se limitait alors à 976-Evil et au quatrième Freddy, dont les cauchemars fantaisistes donnaient un premier aperçu de ce que serait L’Autoroute de l’enfer.

Niveau intentions, le film d’Ate de Jong est inattaquable. Quand bien même ses personnages principaux ne cèdent pas au pêché, l’important reste les épreuves qu’ils auront à affronter en enfer, et qui seront autant de moyens de tourner leur gentillesse en dérision. Mais encore faut-il que le film réponde à ces attentes. Et pour cela, L’Autoroute de l’enfer peut compter avant tout sur un homme : le maquilleur Steve Johnson, ex assistant de Rick Baker (sur Le Loup-garou de Londres, Videodrome…) désormais à son compte (Jack Burton, Le Cauchemar de Freddy…). La faune de l’enfer est pour lui l’occasion d’illustrer sa créativité, avec de nombreux monstres auxquels il faut donner vie. Cela passe par Satan bien sûr, mais aussi par le très nigaud flic de l’enfer (c’est bien pour cela que son rôle est tenu par un ex interprète de Jason Voorhees), par des zombies en tous genres, par un cerbère, par une goule libidineuse etc etc… Avec une variété dans la fantaisie qui n’est pas sans rappeler Beetlejuice, Johnson donne corps à toute une galerie d’allumés qui rendent cet enfer très attrayant. Les surprises attendent les spectateurs à n’importe quel moment, et pas seulement au travers des monstres rencontrés par Charlie au cours de son voyage jusqu’à “Enfer City”. Ate de Jong nourrit aussi la fantaisie de son film en ayant recours à d’innombrables gags visuels plus ou moins discrets qui tapent dans plusieurs catégories… Il y a par exemple l’illustration de proverbes tels que “l’enfer est pavé de bonnes intentions”, il y a la présence effective (Hitler, Cléopâtre, Attila) ou programmée (Khadafi, Jerry Lewis, Imelda Marcos) de personnalités connues, il y a les références à plusieurs films et il y a quelques références bibliques propres à l’enfer (cerbère, Charon sur le Styx, la pomme croquée par Eve exposée dans une vitrine). Là encore, la variété est le maître-mot, et il faut se montrer particulièrement attentif pour déceler toutes les références glissées ici ou là. Toujours dans la même optique, Ate de Jong utilise à fond les propriétés scénaristiques des road movies, remplissant son enfer de plusieurs lieux étonnants : il y a bien sûr les vastes étendues désertiques où l’on peut trouver n’importe quoi (comme une cabine téléphonique) et être attaqué par des Hell’s Angels, mais il y a aussi un restaurant, une boîte de strip-tease, un garage et l’incompréhensible Enfer City. Tout cela s’enchaîne rapidement, maintenant le film en mouvement et permettant d’explorer cet enfer dans un rythme enlevé qui vient encore une fois rappeler que nous avons affaire à un film rock’n’roll, à une série B généreuse dont l’humour -à quelques dialogues ratés près- reste omniprésent mais jamais lourdingue comme il pouvait l’être dans Le Cauchemar de Freddy. Et ce malgré la présence au casting de la famille Stiller au grand complet ! Ben, sa sœur et leur parents, tous dans des petits rôles. Évidemment, tout n’est pas parfait, mais à son niveau, L’Autoroute de l’enfer fait bien mieux que Maximum Overdrive et aurait largement mérité d’obtenir les droits d’AC/DC, si possible de l’époque Bon Scott.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.