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Masters of Horror 1-05 : Chocolat – Mick Garris

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Masters of Horror. Saison 1, épisode 05
Chocolate. 2005

Origine : États-Unis / Canada
Genre : Horreur
Réalisation : Mick Garris
Avec : Henry Thomas, Lucie Laurier, Matt Frewer, Paul Wu…

Divorcé de fraîche date, Jamie (Henry Thomas) accuse le coup, au grand dam de son collègue et ami Wally (Matt Frewer), qui l’exhorte à profiter de son statut de néo célibataire. Une nuit, il se réveille avec un goût de chocolat dans la bouche, première connexion avec Catherine, une jeune femme dont il tombe éperdument amoureux à mesure des projections mentales qui le relient à elle. Désormais, il n’a qu’une obsession : la rencontrer.

Grand ordonnateur du programme, Mick Garris ne pouvait décemment passer à côté de l’opportunité de réaliser un épisode par saison. Pour cette première fournée, suivant l’adage selon lequel « on n’est jamais mieux servi que par soi-même », il porte son choix sur l’une de ses nouvelles. En bon camarade, il n’oublie pas au passage d’adresser un clin d’œil à son ami Stephen King via le livre de chevet de Jamie, qui n’est autre que Désolation, livre qu’il adaptera comme par hasard l’année suivante. On peut reconnaître au bonhomme un talent certain pour vendre sa tambouille, non sans malice.

Alors que la plupart des réalisateurs conviés à la fête ont pris le parti de profiter pleinement de la carte blanche qui leur a été allouée, multipliant les scènes gores qui tâchent à loisir, Mick Garris s’inscrit à contre-courant. Du gore, il n’y en aura qu’au moment de l’éventration de l’artiste volage, et encore la scène se retrouve-t-elle altérée par des retours réguliers sur Jamie, qui vit la scène à travers les yeux de Catherine. Mick Garris a opté pour une sobriété qui sied bien à son histoire, celle d’un homme vidé et sans envie au sortir d’un divorce qu’on devine douloureux (pour lui en tout cas). Une situation personnelle qui prend une tournure paradoxale pour Jamie, lui qui n’a plus goût à rien alors que ses sens – surtout olfactifs et gustatifs – sont au cœur de son travail (il officie au sein d’un laboratoire alimentaire). Le récit épouse donc sa lente résurgence à la vie au gré de projections allant crescendo et balayant tous ses sens. D’abord le goût, puis l’ouïe, la vue, l’odorat et enfin le toucher. Jamie perçoit et ressent ce que vit Catherine à un moment donné lors de flashs plus ou moins forts, jusqu’à un coït matinal qui scelle son destin en le détournant de ses derniers repères tangibles (son fils, son ex femme) pour le plonger dans une passion amoureuse teintée d’irrationnel.

Le postulat est intéressant, et Mick Garris en exploite les diverses possibilités sans jamais chercher à élucider les raisons de ce phénomène. Seules lui importent les conséquences que ces projections récurrentes ont sur l’attitude de Jamie. Peu à peu, son angoisse initiale laisse place aux interrogations puis à la fascination dès lors qu’il s’avère que ses visions concernent une jeune femme. Car dans son malheur, Jamie a tout de même la chance de vivre des instants de la vie d’une demoiselle au corps parfait, ce qui est toujours agréable lorsque vous la découvrez pour la première fois à la faveur de son reflet dans le miroir de la salle de bain aux prémisses de sa toilette. Ben oui, si Mick Garris a mis la pédale douce sur les jets d’hémoglobine, il n’allait pas non plus se passer totalement de l’autre élément constitutif de la série : la nudité. Encore que dans ce domaine là aussi il sait rester mesuré. Et on lui pardonnera d’autant plus volontiers cette facilité d’une Catherine au physique avantageux qu’il n’est pas pour rien dans le trouble qui habite le tout tourneboulé Jamie. Une fois en présence de sa belle, il se montre emprunté et timide comme s’il s’agissait de sa première fois. En un sens, c’est le cas puisque cette expérience viscérale (l’expression “avoir quelqu’un dans la peau” revêt ici tout son sens) relève de l’inédit. Henry Thomas, l’inoubliable Elliott d’E.T et qui avait déjà tourné sous la férule de Mick Garris pour Psychose IV avant de récidiver pour Désolation, traduit parfaitement les tourments – qu’on pourrait qualifier d’adolescents – de son personnage. Il a ce côté touchant de l’amoureux transi pour lequel plus rien d’autre n’a d’importance que d’être avec la personne aimée, et tant pis si celle-ci s’est rendue coupable d’un meurtre. A ce titre, il est regrettable que la fin soit ainsi expédiée tant la relation ambivalente entre Catherine et Jamie aurait mérité d’être creusée davantage. Néanmoins, Mick Garris parvient à conserver la cohérence de son récit, le final ne cédant pas trop à la surenchère.

Pour son premier écot aux Masters of Horror, Mick Garris mêle les genres avec une délicatesse et une efficacité qu’il n’avait guère montrées jusqu’alors. Reposant sur un postulat éminemment fantastique qui lui confère son originalité, Chocolat s’impose avant tout comme un savoureux film noir. Une réelle et bonne surprise.

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