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Scarface – Howard Hawks

 

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Scarface. 1932

Origine : États-Unis
Genre : Film noir
Réalisation : Howard Hawks
Avec : Paul Muni, Ann Dvorak, Karen Morley, Osgood Perkins…

Tony Camonte (Paul Muni) travaille comme tueur à gages pour le compte de Johnny Lovo (Osgood Perkins, le père d’Anthony). Ce dernier ne tarde pas à faire de Camonte son garde du corps. A partir de là, Camonte va s’émanciper et gravir rapidement les échelons. Mais plus dure sera la chute…

A l’origine de ce projet, il y a le livre de Armitage Trail dans lequel est retracé de façon romanesque l’ascension criminelle d’un gangster réputé, Al Capone. Howard Hawks, qui désirait depuis fort longtemps réaliser un film noir, s’appuie sur ce livre pour écrire son scénario. Une écriture qui n’est pas de tout repos puisqu’à cette époque -1931-, le code Hays sert de garde fou au moindre excès. Ainsi, le scénario doit être réécrit de nombreuses fois, notamment la fin, afin d’éviter que le gangster en sorte magnifié. Le film a finalement pu se tourner mais le produit fini ne convient toujours pas à William Hays. Bloqué par la censure, Scarface ne doit sa sortie qu’à un énième remaniement initié par Howard Hugues, le producteur. Ce dernier a dû se résoudre à filmer un prologue moralisateur, une séquence chez le maire et une nouvelle fin où Camonte est pendu. Heureusement, cette version semble avoir totalement disparu et seul le prologue moralisateur, en fait un panneau indiquant que le film est un réquisitoire contre la loi de la pègre, figure sur la version actuellement disponible.

En l’état, le film de Howard Hawks, bien qu’édulcoré, contient encore bon nombre d’aspects subversifs, que l’on retrouve pour la plupart dans la personnalité de Tony Camonte. Acteur issu du théâtre, Paul Muni excelle à retranscrire toute la fougue de son personnage, quitte à en faire un chouïa trop (on retrouvera le même style de jeu chez Al Pacino, lui aussi issu du théâtre, dans la version de DePalma). Tony Camonte est un grand enfant dont le principal amusement est d’éliminer tous ceux qui font obstacle à son avènement. C’est flagrant lorsqu’il se procure pour la première fois une mitraillette, l’arme de prédilection de cette période. Tel un enfant qui trouve le cadeau de ses rêves au pied du sapin, les yeux de Camonte s’illuminent à la vision de ce “joujou” et trépigne à l’idée de s’en servir.
En grand gamin qu’il est, Camonte est insouciant et ne réfléchit pas aux conséquences de ses actes. Il n’hésite pas à draguer ouvertement Poppy (Karen Morley), la fiancée de Lovo, tout en éprouvant bien plus que de l’amour fraternel à l’égard de sa jeune sœur Cesca (Ann Dvorak). Un comportement qui aura une grande incidence quant à la suite de sa carrière.
Scarface se concentre sur le milieu de la pègre, les policiers n’occupant qu’un rôle secondaire. Howard Hawks montre leur impuissance face aux avocats des gangsters, lesquels parviennent toujours à trouver la faille dans les textes de loi afin de libérer leurs clients. Le détective qui s’acharne sur Camonte n’est qu’un policier aigri qui rêve de mettre un terme à ses agissements, ce qu’il parviendra à faire.
Dans la fin initialement prévue, Camonte défiait jusqu’au bout la mort et les forces de l’ordre. Dans la fin qui a finalement été tournée, et acceptée par Howard Hawks, il meurt de façon moins héroïque en tentant de s’enfuir. Grâce à l’interprétation de Paul Muni, Tony Camonte ne nous apparaît pas comme le lâche que les censeurs voulaient voir, mais plutôt comme un personnage pathétique et profondément humain.

Scarface, malgré bon nombre de remaniements, demeure un film splendide et un beau témoignage de son époque. Howard Hawks a réalisé un film violent et réaliste, mais non dénué d’humour (les scènes du secrétaire illettré de Camonte sont de grands moments). En outre, il bénéficie d’une distribution riche en visages patibulaires, de laquelle n’a pas de mal à émerger Boris Karloff, l’inoubliable interprète de la créature dans Frankenstein, sorti l’année précédente.

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