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Pénitencier de femmes – Bruno Mattei

penitencierdefemmes

Violenza in un carcere femminile. 1980

Origine : Italie / France 
Genre : Women In Prison 
Réalisation : Bruno Mattei 
Avec : Laura Gemser, Gabriele Tinti, Lorraine De Selle, Leila Ducci…

Pour sa septième excursion, Black Emanuelle (toujours Laura Gemser) s’en va dans une quelconque dictature bananière latine pour une petite infiltration dans un pénitencier sans prétention. Toujours journaliste, toujours prête à payer de sa personne, elle officie cette fois pour le compte d’Amnesty International, qui a des soupçons quand au respect des droits de l’Homme (mais aussi de la Femme, du coup) dans ce genre d’établissements. Se faisant passer pour une certaine Laura Kendall, prostituée et vendeuse de drogue, Emanuelle découvre un monde d’esclavage, d’humiliations psychologiques et physiques régi par une directrice et des gardiennes peu avenantes.

Rien de neuf derrière les barreaux : un WIP reste un WIP, c’est à dire un genre outrageusement codifié, même lorsqu’il s’orne des oripeaux de Black Emanuelle pour disposer d’un argument de vente supplémentaire. Ce fut déjà le cas pour Emanuelle et les derniers cannibales (cinquième de la série), qui n’était après tout qu’un film de cannibales opportuniste ne faisant de sa célèbre héroïne qu’une aventurière lambda, sans passé aucun. Rien non plus dans Pénitencier pour femmes ne laisse suggérer qu’il s’agisse du septième opus d’une saga pirate elle-même piratée… Malgré tout, outre Laura Gemser, on retrouve Gabriele Tinti, mari de l’actrice et fidèle de la série puisqu’il ne manqua qu’un seul épisode (Emanuelle et les filles de Madame Claude). Comme d’habitude il incarne le sauveur potentiel et donc l’amant en devenir de notre belle journaliste, ici un prisonnier reconverti en médecin par les bonnes faveurs d’une directrice chaude comme la braise (Lorraine De Selle, tout juste sortie de Cannibal Ferox). A vrai dire, le seul changement notable quand à la série se trouve derrière la caméra, où Bruno Mattei remplace un Joe d’Amato en poste depuis le chapitre 2, amenant dans ses valises son indéboulonnable assistant Claudio Fragasso pour tourner non pas un mais deux Black Emanuelle (le second étant Révolte au pénitencier de filles) situés dans les mêmes décors et avec les mêmes acteurs… Ce seront les deux derniers films de la série, dont l’extinction est cela dit plus imputable à la dégradation du cinéma italien qu’aux méfaits de Bruno Mattei.

Et puis il faut bien admettre que Mattei ou d’Amato, cela n’a que peu d’importance ici. Pénitencier de femmes n’est qu’un énième catalogue d’un genre qui lorsque plongé entre ses deux extrêmes (disons à titre d’exemple la malignité du premier Ilsa et l’humour bon enfant des WIP avec Pam Grier de chez Corman) est il faut bien l’avouer plutôt rasant. L’accumulation d’humiliations une heure et demi durant pour terminer sur une révolte victorieuse (qui à tous les coups laisse quelques pauvres victimes en cours de route) conduit forcément à un certain encroûtement du film, la spontanéité étant vite remplacée par un déroulement machinal sans grande conviction. Ainsi Laura Gemser subit-elle passivement ses mésaventures au milieu de ses petites camarades, toutes aussi résignées qu’elle. Si ce n’est pour la jeune Consuelo, que la fragilité porte aux crises de larmes, toutes suivent le même chemin que la vieille Pilar, doyenne des prisonnières, qui ferme sa gueule et prend sur elle. Pour peu, on en viendrait presque à comprendre la raison pour laquelle la directrice et les gardiennes travaillent aussi peu leurs idées de tortures… A quoi bon se décarcasser si les victimes déjà peu nombreuses -elles ne sont pas plus de dix- ne réagissent pas ? Ce n’est pas drôle. Tenez, par exemple, forcer une droguée en manque à coucher avec une détenue acquise à votre propre cause, quel est l’intérêt, puisqu’aucune des deux n’y trouve à redire ? Alors oui, la gardienne en chef se masturbe devant le spectacle, mais se rendant compte du manque de réactivité de ses victimes elle les renvoie fissa au gnouf à coup de matraque. Et ce qui est valable pour la gardienne l’est aussi pour les spectateurs : jouées sans conviction, les scènes érotiques n’ont que peu d’attrait. Elles sont tout aussi fades que ne le sont les mises en contextes, rudimentaires, ou que les tortures, quasi inexistantes.

Pénitencier de femmes est soft à tous les niveaux. Et pourtant, Mattei continue à employer le premier degré et la musique électronique fataliste, comme si il était vraiment persuadé de choquer un public qui en a vu d’autres. Sans vouloir médire sur le dos de Laura Gemser et de ses petites camarades, le pénitencier lui-même a plus d’impact que les sévices perpétrés sur les prisonnières. Avec son humidité, ses larges couloirs et ses murs aux couleurs chaudes, il aurait fait un formidable théâtre pour un film moins encroûté. Mais soyons tout de même honnêtes : quelques scènes font mouche, comme l’attaque des rats aux yeux rouges (pas encore arrivés à Manhattan) sur une Emanuelle confinée au mitar pour avoir balancé un sceau de merde à une gardienne -son seul acte de rébellion-, ou encore l’offrande de Consuelo à deux détenus hommes orchestrée par la directrice, qui observe la scène derrière ses vitraux multicolores donnant une certaine identité visuelle à la scène. Dommage cependant que Mattei se contente de filmer les regards. Les hommes de l’autre aile du pénitencier sont en fait bien plus jouasses que ces dames : ils prennent leur enfermement à la rigolade, et trouvent toujours le moyen de reluquer au travers des fenêtres de la section femmes -au grand dam de l’homosexuel, qui se sent trompé (et qui devra en plus essuyer les retombées de ces émoustillages)-. Bref ils ont choisit la bonne humeur, ce en quoi ils auraient pu inspirer Laura Gemser et sa bande, lesquelles auraient certainement vu passer le temps plus vite, comme leurs spectateurs.

Pénitencier de femmes a tout du film bâclé en deux temps trois mouvements. Même les amateurs de “nanars” aguichés par le nom de Bruno Mattei n’y trouveront pas leur compte.

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