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OSS 117 : Le Caire nid d’espions – Michel Hazanavicius

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OSS 117 : Le Caire, nid d’espions. 2006

Origine : France
Genre : Espionnage parodique
Réalisation : Michel Hazanavicius
Avec : Jean Dujardin, Bérénice Béjo, Aure Atika, Philippe Lefebvre…

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Suite à la mort de l’agent OSS 283, OSS 117 est envoyé au Caire pour découvrir les raisons de son assassinat, ainsi que pour sécuriser le Proche-Orient. Sous l’identité de Lucien Bramard, il reprend la direction de la SCEP -société spécialisée dans l’exportation de poulets- couverture qui doit lui permettre de se fondre plus facilement dans la société cairote. Sur place, il se retrouve au centre d’un imbroglio monstrueux mêlant un roi déchu désireux de reconquérir son trône, un groupe de religieux fanatiques prêts à déclencher une guerre sainte, ou encore des nostalgiques du régime nazi. Et au-dessus de tout ça plane l’ombre malfaisante d’un homme aussi mystérieux qu’impitoyable. Une mission qui ne s’annonce pas de tout repos et que pourtant l’agent OSS 117 mènera à bien sans se départir de son inamovible sourire.

Hubert Bonisseur de La Bath, alias OSS 117 est une création de l’écrivain français Jean Bruce. La première aventure de son héros à succès –Tu parles d’une ingénue– voit le jour en 1949, soit quatre ans avant son pendant britannique James Bond alias l’agent 007 créé par Ian Fleming. A l’origine, il s’agit d’un espion américain qui puise son origine française d’ancêtres qui se sont installés en Louisiane en 1789. L’agence pour laquelle il travaille -Office of Strategic Services soit le bureau des services stratégiques- a véritablement existé. Cette agence de renseignements du gouvernement américain a vu le jour le 13 juin 1942, conséquence de l’entrée en guerre des Etats-Unis. Durant le conflit, elle a diversifié au maximum ses activités qui allaient du simple renseignement à l’envoi d’officiers en uniformes dans le cadre de missions spéciales. L’agence est démantelée le 1er octobre 1945 sous l’impulsion du président des Etats-Unis de l’époque, Harry Truman. Les agents de l’OSS sont alors reversés dans d’autres organismes d’Etat comme la CIA, où OSS 117 se voit promu au grade de Colonel. Suite à son énorme succès littéraire, le cinéma s’intéresse à la création de Jean Bruce, ce qui aboutit en 1957 à la sortie de OSS 117 n’est pas mort. Le film passé inaperçu, il faudra attendre l’avènement cinématographique du concurrent britannique dans James Bond contre le Dr No pour que OSS 117, sous la direction de André Hunebelle, fasse son grand retour et attire enfin les foules dans les salles obscures. A OSS 117 se déchaîne succéderont quatre autres aventures mouvementées qui attireront de moins en moins de monde à mesure que James Bond s’affirmera comme le mètre étalon de l’espionnage rocambolesque. Au début des années 70, OSS 117 tentera bien de revenir aux affaires, mais il n’avait décidément plus sa place dans le paysage cinématographique et audiovisuel français.

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Et puis arrivent les années 2000, ces années qu’on envisageait seulement sous l’angle d’un progrès à tout crin alors que celles-ci se caractérisent davantage par leur nostalgie. Le cinéma n’échappe pas à la tendance, lui qui depuis quelques années puise abondamment dans la télévision et la littérature de grand papa pour trouver l’inspiration. Après Belphégor, Arsène Lupin et conjointement aux Brigades du Tigre, OSS 117 ressort des limbes de la mémoire collective. Il revient au scénariste Jean-François Hallin de redonner vie au personnage, de sorte que celui-ci puisse à notre époque attirer encore les foules. C’est donc logiquement qu’il tend vers la comédie, genre le plus sollicité en France et, pour peu que votre distribution contienne au minimum une vedette du petit écran, celui qui bénéficie des plus grandes facilités de financement. Ce qui est chose faite en confiant le rôle de l’espion à Jean Dujardin, ex membre du quintet comique Les Nous C Nous et surtout le Loulou d’Un gars une fille, pastille humoristique télévisuelle qui lui a permis de s’immiscer dans le quotidien de millions de foyers français. Toutefois, si sa présence permet de rassurer les producteurs quant à la solvabilité de l’entreprise, elle peut dans le même temps susciter quelques craintes quant à a tonalité globale du film. On ne compte plus le nombre de comédies balourdes qui font florès depuis trop longtemps, à force de ne reposer que sur un concept plutôt qu’un scénario solide. Or Jean-François Hallin, appuyé dans sa démarche par le réalisateur Michel Hazanavicius, préfère user d’un humour plus subtil au sein d’une mécanique parodique visant à renouer avec l’esthétique des films des années 50 – 60. Un gros travail a donc été fourni sur les décors, les costumes et les accessoires mais aussi sur la manière de filmer. Ainsi, le réalisateur filme les scènes nocturnes en nuit américaine, chaque passage mettant en scène les personnages sur un véhicule motorisé est filmé en plan fixe avec une bande enregistrée qui défile à l’arrière pour figurer le décor, et il use d’une pellicule moins sensible à la lumière pour retrouver cette coloration propre aux films de ces années là. Esthétiquement, OSS 117 : Le Caire nid d’espions se révèle d’une grande richesse et témoigne de l’extrême soin avec lequel ce film a été conçu. Quant au personnage principal, ils ont procédé à une refonte totale de son curriculum vitae. OSS 117 est désormais un français pure souche, fier de lui, toujours prompt à défendre les intérêts de la France de la IVe République et à en véhiculer les valeurs. L’intrigue se déroule en 1955 soit un an après la prise du pouvoir par le seul Nasser à la suite d’un coup d’état qui l’a vu éliminer Néguib, le Général qu’il avait conduit au pouvoir, et les communistes. Le Caire est en proie à une vive agitation qui synthétise la situation de l’Afrique du Nord dans sa globalité. Un vent de liberté souffle sur les pays du Maghreb qui aimeraient bien s’affranchir une fois pour toute de la tutelle occidentale. Le monde change, mais la France de la IVe République n’est pas prête à l’accepter. La défaite de Dîen Bîen Phû l’année précédente qui a abouti à l’éviction de la France de l’Indochine demeure encore très ancrée dans les mémoires. L’esprit colonialiste est toujours présent dans la société française de l’époque, et celui-ci se retrouve tout entier dans le personnage de Hubert Bonisseur de La Bath. OSS 117 se désintéresse complètement des coutumes du pays qu’il visite. Pour lui le français issu d’un grand pays, il n’a rien à apprendre d’un pays où les voitures sont couvertes de poussière et où les gens circulent encore à dos de mulets. Il témoigne de cette suffisance et de cette condescendance propres aux colonisateurs, persuadé d’être un modèle pour tout un peuple aux mœurs qui lui paraissent aussi incongrues qu’étranges. A cela s’ajoute une grande vanité qui lui donne la certitude que toutes les femmes ne peuvent lui résister. Décrit comme ça, le personnage de OSS 117 dispose de tous les atouts pour paraître détestable aux yeux de tous. Ce qui aurait été le cas si les auteurs avaient décidé de prendre ce personnage trop au sérieux. Or, bien aidé par l’interprétation de Jean Dujardin, ils en ont fait une sorte de gros bêta pas fichu d’avoir de bonnes intuitions, qui mène son enquête sans trop savoir où il va et dont la réussite de sa mission découle avant tout de la chance et de l’aide de Larina. En fait, le OSS 117 version Jean-François Hallin/Michel Hazanavicius est un mélange du Franck Drebin des Y a-t-il un flic… ? pour son air constamment hébété et sa maladresse chronique (au point d’en être dangereuse sur le plan diplomatique), et de Superdupont -le héros franchouillard créé par Lob et Gotlib- pour son total dévouement à son pays et à ses valeurs. Et n’omettons pas le James Bond incarné par Sean Connery auquel certaines attitudes de Jean Dujardin renvoient directement.
L’intrigue du film en tant que telle importe peu. Elle ne sert que de canevas aux auteurs pour dresser un portrait de la société de l’époque et s’en moquer gentiment. Le ton est bon enfant et l’humour, plutôt gentillet, repose essentiellement sur les épaules de Jean Dujardin. Plutôt à l’aise dans l’ensemble, il ne peut s’empêcher de retrouver quelques intonations et réflexes qui trahissent son passé de comique de troupe, et s’offre d’ailleurs un numéro de chant (une reprise du Bambino de Dalida) en forme de sketch indépendant du reste du film. A ses côtés, Bérénice Béjo et Aure Atika constituent les atouts charmes du film. La première joue Larina, la fille du roi déchu Farouk. A ce titre, elle apporte un contrepoids à la bêtise crasse de OSS 117, le remettant à sa place à chaque fois que son attitude hautaine dénigre son peuple. Durant une bonne partie du film, elle se montre indépendante et surtout peu sensible au charme de l’agent français. Mais au fil de l’intrigue, son statut de femme la rappellera à l’ordre et elle terminera dans les bras du héros, comme il se doit. Quant à la seconde, elle campe le personnage de la princesse Al Tarouk, vieille ennemie de OSS 117 et surtout vieille amante, celle-ci ne pouvant s’empêcher de succomber à cet homme. Elle joue les utilités dans une intrigue qui compte de nombreux personnages, celui de la princesse ne comptant pas parmi les plus indispensables. Encore une fois, Aure Atika se retrouve prisonnière d’un rôle étriquée qui ne joue que sur l’attraction qu’elle provoque chez les hommes.

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Loin du chef d’œuvre d’humour et d’intelligence tant vanté à l’époque de sa sortie, OSS 117 : Le Caire nid d’espions s’avère être une comédie certes au-dessus de la moyenne, mais finalement très vite oubliable. C’est bien fait, certaines scènes prêtent effectivement à sourire, mais une intrigue trop lâche et des gags trop répétitifs nous amènent à trouver le temps bien long. Une suite est annoncée pour 2009, avis aux amateurs.

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