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Les Contes de l’âge d’or – Hanno Höfer, Razvan Marculescu, Cristian Mungiu, Constantin Popescu, Ioana Uricaru

contesdelagedor

Amintiri din epoca de aur. 2009. 

Origine : Roumanie 
Genre : Satire 
Réalisation : Hanno Höfer, Razvan Marculescu, Cristian Mungiu, Constantin Popescu, Ioana Uricaru 
Avec : Alexandru Potocean, Teodor Corban, Avram Birau, Paul Dunca…

En six sketches, Contes de l’âge d’or dépeint la Roumanie des dernières années sous Ceaucescu, les années 80, et l’ambiance qui y régnait, plombée par les difficultés quotidiennes et un fond diffus de méfiance et de peur, tout en mettant en avant les diverses astuces et embrouilles des uns et des autres pour améliorer un peu l’ordinaire. Le tout avec un humour teinté d’ironie et d’autodérision fort bienvenu et qui fait souvent mouche. Premier à ouvrir le bal, “La Légende de la visite officielle” nous montre un village en pleine préparation pour le passage d’une délégation importante et les tourments du maire et de ses administrés pour se conformer aux attentes, réelles ou supposées, du parti. L’arrivée de deux inspecteurs venus contrôler l’avancée des préparatifs et l’installation d’un manège pour la fête annuelle vont chambouler encore un peu plus la tranquillité du village.

Quittant la campagne pour se rendre à la capitale, “La Légende du photographe officiel” narre les contraintes imposées au dit photographe et les retouches nécessaires pour répondre aux desideratas des officiels du parti. Stressante, la fonction n’est pas de tout repos et lorsque le Président français, Valéry Giscard d’Estaing, pose le pied sur le sol roumain pour une visite protocolaire, les clichés pris destinés aux journaux se doivent de correspondre à la réalité… que l’on veut montrer au public…
“La Légende des marchands d’air” navigue dans les eaux troubles qui coulent des robinets des grands ensembles urbains. Prétendant contrôler la qualité de l’eau et, surtout, sa pollution, Bughi fait du porte-à-porte, récupérant ainsi de précieux échantillons dans des bouteilles données par les habitants, bouteilles consignées rapportant donc quelques lei… Au cours de ses visites, Bughi rencontre la jeune Crina, encore lycéenne mais qui rêve de se faire un peu d’argent. Elle devient son associée, l’élève dépassant rapidement le maitre dans l’entourloupe à la petite semaine.

Dans “La Légende du policier avide”, c’est un porc qui fait irruption dans la vie d’une petite famille. Rapporté par le cousin de la campagne pour améliorer les repas en ces temps festifs, ce brave et gros cochon ne pose qu’un seul problème, mais un fameux : il est vivant. Pour le manger, il va donc bien falloir le tuer. Oui, mais comment ???
Dans “La Légende du livreur de poules”, un chauffeur-routier se retrouve confronté à la tentation extraconjugale et au vol d’œufs lorsque ses roues avant sont volées lors d’une halte et qu’il se retrouve coincé dans une auberge, à mi-chemin de son parcours de livraison.
Enfin, dans “La Légende de l’activiste zélé”, on part à la rencontre d’un village reculé où un jeune membre du parti particulièrement militant est bien décidé à faire reculer l’analphabétisme. Donneur de leçons forcément écouté grâce à l’autorité que lui confère son appartenance au parti, il en prendra aussi quelques unes auprès des citoyens du coin, non sans mal, il faut bien le dire…

Si la plupart des films à sketches offrent des segments inégaux et parfois très éloignés les uns des autres, Contes de l’âge d’or se révèle plutôt harmonieux de ce point de vue, baignant constamment dans un univers kafkaïen teinté d’humour, la seule légende trop longue étant celle des marchands d’air, qui aurait gagné en efficacité en étant un peu raccourcie. Chaque tranche de vie offre son lot d’incongruités, des demandes des inspecteurs préparant la visite officielle (peindre les pigeons en blanc, par exemple), à celles des hiérarques du parti estimant que, si Giscard d’Estaing a un chapeau sur la tête, le camarade Ceaucescu ne peut être montré tête nue. La tension est tout le temps présente aussi, qui fait qu’on se méfie des Volga noires s’arrêtant à proximité, qu’on doit réfréner son langage, ou qu’on comprend, à demi-mots les attentes des uns et des autres, parfois au risque du contresens.

Le système D, ensuite, érigé en instrument de base de l’amélioration du quotidien, depuis le simple pékin jusqu’à l’activiste rattrapé par le système, en passant par le policier devant s’improviser abatteur de porc. Le tout dans un environnement assez généralement médiocre en ville : l’eau du robinet est souvent jaunâtre, l’air est empesté par les odeurs venues des usines voisines ; un univers plus naturel mais non moins difficile à la campagne : routes défoncées isolant certains villages, absence d’école ou de dispensaire, rudesse générale des conditions de vie.
Comme dans toute dictature communiste qui se respecte, la parole officielle est d’or et la vérité ne sort pas de la bouche des enfants mais de celle du secrétaire général. La propagande ayant qualifié à l’époque cette période d’âge d’or, l’ironie du titre est d’autant plus cruelle qu’elle met en évidence le carton pâte de ces années difficiles mixant les grandes envolées lyriques et les promesses de lendemains qui chantent à des non-dits parfois subtils et des aujourd’hui qui ne fredonnent même pas. Quoique. La vitalité dont font preuve tous les acteurs de ces mini-tranches de vie montre un peuple bien vivant malgré la chape de plomb imposée par un Père Ubu et sa femme. Des contes qui ne sont pas de fées, donc, mais bien agréables à regarder.

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