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La Créature du marais – Wes Craven

creaturedumarais

The Swamp Thing. 1982

Origine : États-Unis
Genre : Fantastique
Réalisation : Wes Craven
Avec : Adrienne Barbeau, Ray Wise, Dick Durock, Louis Jourdan…

En 1982, Wes Craven est content : on lui propose de s’affranchir un peu du film d’horreur pur et dur pour porter à l’écran l’adaptation d’un comic du duo Wein et Wrightson, à savoir La Créature du marais, publié par DC Comics. Nous sommes dans la vague d’adaptations de comics lancée par Superman, mais il ne faut pourtant pas croire que Craven bénéficia des avantages d’une grosse production. Budget réduit et tournage très serré, d’autant plus ardu qu’il se déroule dans les marais de Caroline du Sud. Le futur créateur de Freddy n’hésite pourtant pas et se lance dedans comme en 14. Grand mal lui en prit, puisqu’il signe là un film assez lamentable.

L’histoire tourne autour du Dr. Holland, qui depuis son laboratoire dans les marais a la royale idée de créer une potion capable de faire pousser les plantes n’importe où et de les doter d’une intelligence toute humaine. A l’inverse, lorsque la potion est appliquée à un humain, elle transforme celui-ci en monstre végétal, décuplant au passage ses caractéristiques physiques et morales. A la suite d’un immonde attentat ourdi par l’infâme savant fou Arcane, Holland va donc faire les fruits de son invention, et il sera transformé en créature du marais. Avec l’aide d’Alice, une jeune collègue scientifique (Adrienne Barbeau), il essayera d’éviter que Arcane ne mette la main sur l’intégralité des notes de fabrication de la tant convoitée potion…

Pour palier à la durée réduite du tournage, Craven n’hésite pas à faire l’impasse sur la présentation de ses personnages, qui du coup sont d’une inconsistence rare. En quelques minutes, Alice vient prendre son poste dans le laboratoire du marais, se fait draguer par le bon et modeste Dr. Holland, puis pleure le sort de celui-ci, transformé en espèce de gentille Créature du lac noir. Tout va très très vite, et de réalisme, il n’est aucunement question. En plein milieu du film, un gamin noir bedonnant pourvu de grosses lunettes encore moins discrètes que celles de Buddy Holly viendra même se greffer à l’intrigue, après avoir brièvement rencontré Alice dans une station service. A quoi sert-il ? Pourquoi risque-t-il sa peau ? N’a-t-il rien d’autre à faire de ses journées que de suivre les justiciers écolo de grands chemins ? Tout un tas d’interrogations pour un personnage qui pourrait aussi bien avoir été la participation du trio des ZAZ au scénario de Wes Craven. Les hors-sujets comme celui-ci sont assez nombreux, même si aucun n’atteint le même degré de surréalisme. Nonobstant le fait que ses personnages sont aussi creux que le ventre d’un prisonnier politique nord-coréen, le réalisateur s’attache pourtant à nous placer au gré des temps libres du scénario une espèce de romance entre Alice et celui qui fut le Dr. Holland, n’évitant pas l’habituel couplet sur l’amour impossible, sur le personnage torturé et sur sa belle toute triste. Il n’hésite pas non plus à ressortir la vision caricaturale du méchant qui cherche à dominer le monde, avec un Arcane à la tête d’une vraie horde de salopards consistant en trois quatre abrutis en tenue de camouflage (si si : en plus ils ont des branches d’arbres accrochées à leur casque) dirigés par un David Hess nettement moins en forme que dans La Dernière maison sur la gauche.

On pourrait se dire qu’à défaut d’intelligence, Craven préféra miser sur l’action… Ca ne serait pas faux. Mais celle-ci pâtit d’éléments tous plus indigents les uns que les autres. Les effets spéciaux sont consternants : les plis dans le costume de la Créature du marais sont nombreux, les transformations (car oui, d’autres personnes vont goûter à la potion) sont catastrophiques et le combat final entre la Créature et son ennemi privilégié, devenu une sorte d’homme-sanglier en plastique, dépassera les limites du ridicule. Craven n’a pourtant pas honte, et ne cherche même pas à dissimuler les lacunes flagrantes dûes à son budget rachitique. Il filme tout ça grossièrement, sans aucune inspiration, se contentant d’effets de montages censés évoquer la bande-dessinée, et misant sur la musique de Harry Manfredini. Manque de bol, celle-ci se révèle nullissime : le compositeur attitré de la saga Vendredi 13 se croit encore dans un film avec Jason Voorhees, et nous ressort le seul genre de musique qu’il doit être capable de composer (ses BO sont toujours interchangeables et aussi monotones que les Vendredi 13 eux-mêmes).

Il n’y a pas à dire : La Créature du marais est une nullité invraisemblable pour un réalisateur qui peu de temps avant réalisait La Colline a des yeux et qui peu de temps après se penchait sur Les Griffes de la nuit. Les amateur du comic de départ doivent l’avoir mauvaise, tant on a l’impression que Craven a ouvertement cherché à se foutre de la gueule des comics, avec leurs histoires de super-héros bourrées de poncifs et de raccourcis, comme au temps de Stan Lee. Craven ne renie pourtant aucunement son film, déplorant seulement le manque d’argent et la brièveté de son tournage. Peut-être en garde-t-il surtout le souvenir ému de sa rencontre avec sa future femme, la jolie actrice Mimi Craven…

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