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Seton, tome 1: Lobo, le roi des loups – Taniguchi & Imaizumi

Seton
Tome 1 : Lobo, le roi des loups. 2006

Origine : Japon
Genre : Historique, aventure
Dessins : Jirô Taniguchi
Scénario : Yoshiharu Imaizumi
Editeur : Kana

 Jirô Taniguchi est un amoureux de la nature. Pour preuve, nombre de ses œuvres tournent autour d’hommages plus ou moins direct à Mère nature. Je pense par exemple au Sommet des Dieux, superbe aventure se situant dans l’Himalaya, K, aussi, histoires courtes d’un formidable sauveteur dans les plus hautes montagnes du monde, L’Orme du Caucase, là-encore des histoires courtes en rapport direct ou non avec la nature…

Avec Seton, Taniguchi montre son attachement à la planète et à ses êtres vivants. Il collabore ainsi avec Yoshiharu Imaizumi au scénario (ou en tout cas il en a l’idée originale, mais qu’est-ce que ça peut bien vouloir signifier ?) pour mettre en image la vie d’Ernest Thompson Seton, l’un des plus grands naturalistes de l’histoire de notre planète bleue (en même temps, je ne connais que l‘histoire de notre planète, aussi bleue soit elle…). A vrai dire, Seton n’est pas très connu de par chez nous. Mais au Japon, il lui est voué un véritable culte. Je ne sais pas vraiment pourquoi c’est tombé sur lui, mais en lisant ses aventures, on ne peut que rester admiratif d’une telle vie et de l’œuvre qu’il a laissée derrière lui.

Ainsi, en découvrant les pages de ce manga, on est directement plongé dans le sud profond des Etats-Unis, là où les cow-boys gardent leurs vaches ou autres moutons. Sauf qu’un loup mystérieux tue, avec l’aide de sa meute, le bétail surveillé par les hommes. A priori, voilà un problème pouvant être réglé par n’importe qui. Sauf que ledit loup, Lobo, est inattrapable. Il déjoue tous les pièges tendus par les hommes, et sait même reconnaître une viande empoisonnée. Le temps passe et le loup règne en maître sur ses terres. Les hommes sont impuissants et font même appel aux plus grands chasseurs de loups du pays. Tous se plantent. Lobo n’est pas un loup comme les autres. Et comme d’habitude, quand les hommes ne comprennent pas ce qu’ils voient, ils l’attribuent à Dieu, et plus précisément ici, au diable, car il fait le mal.

Seton, qui revient tout juste de Paris où il a tenté de percer dans l’art est déjà un naturaliste confirmé. Une de ses œuvres est rejetée par le salon de Paris car on y voit un loup mangeant le crâne d’un homme. Il découvre alors tout l’académisme scientifique et artistique de l’époque qui refuse qu’un animal puisse être supérieur à l’homme. Sa passion pour les animaux sauvages et la nature en général le poussent à aller gagner sa croûte dans le grand Ouest. Le père d’une amie l’y invite et lui raconte l’histoire de Lobo. Seton veut à tout prix le voir.

Ce premier tome raconte l’histoire d’un duel entre l’homme et la nature. Seton est représenté comme non pas un chasseur cruel qui doit se débarrasser d’un nuisible, mais bel et bien comme un naturaliste qui veut à tout prix comprendre ce loup si particulier qui arrive à déjouer les pièges posés par les hommes.

Tiré d’une histoire vraie (Lobo, le roi des Currumpaw), ce récit ne se contente pas de faire de l’aventure. C’est un hymne à la nature sauvage. Déjà, au début du 20ème siècle, Seton a conscience des enjeux écologiques. Il a aussi conscience que l’homme s’est installé sur des terres ne lui appartenant pas et n’a jamais su s’accommoder des animaux, les repoussant, les tuant, pensant que la terre leur appartient. Ce discours, banal pour nous aujourd‘hui, est pourtant déjà exceptionnel pour l’époque. Bien qu’il soit plus développé dans les prochains tomes, on sent déjà que Seton refuse d’être un homme qui prend quelque chose qui ne lui appartient pas. Il veut partager. Lobo a tout autant le droit d’être là que les hommes. Bien sûr, c’est la loi du plus fort qui l’emporte. Et cette loi qui s’exprime à travers la cruauté des hommes est critiquée par Seton et les auteurs de ce bouquin.

Ainsi, l’histoire de Seton fait écho en ce début de 21ème siècle. Les problèmes qu’il voyait germer déjà à son époque font notre actualité aujourd’hui et semblent ne pas se résoudre.

Taniguchi, comme à son habitude, réalise une bande dessinée visuellement exceptionnelle. Les terres arides sont magnifiquement retranscrites. Plus encore, ce sont les animaux qui vivent sous le trait de cet auteur de génie qui arrive à les faire vivre et à retranscrire toute leur sauvagerie.

Avec Lobo, le roi des loups, on tient là un manga intelligent et pertinent. Si la cruauté des hommes est mise en avant, ce n’est pourtant pas un récit manichéen. Néanmoins, la critique est virulente et nous rappelle que nos excès et notre cruauté nous ont amenés parfois bien trop loin.

Un hymne à la nature sauvage, un livre riche en enseignements.

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